BAUDELAIRE RENCONTRE DALI

Salvador Dali, La persistance de la mémoire, 1931, huile sur toile, 24 x 33 cm, Museum of Modern Art, New York

Le Temps mange la vie


Time consumes Life

Charles Baudelaire,  » L’ennemi  » dans Les Fleurs du Mal, 1857

Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage,
Traversé çà et là par de brillants soleils ;
Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage,
Qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.

Voilà que j’ai touché l’automne des idées,
Et qu’il faut employer la pelle et les râteaux
Pour rassembler à neuf les terres inondées,
Où l’eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve
Trouveront dans ce sol lavé comme une grève
Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ?

– O douleur! ô douleur! Le Temps mange la vie,
Et l’obscur Ennemi qui nous ronge le cœur
Du sang que nous perdons croît et se fortifie !


My youth was nothing but a black storm
Crossed now and then by brilliant suns.
The thunder and the rain so ravage the shores
Nothing’s left of the fruit my garden held once.

I should employ the rake and the plow,
Having reached the autumn of ideas,
To restore this inundated ground
Where the deep grooves of water form tombs in the lees.

And who knows if the new flowers you dreamed
Will find in a soil stripped and cleaned
The mystic nourishment that fortifies?

—O Sorrow—O Sorrow—Time consumes Life,
And the obscure enemy that gnaws at my heart
Uses the blood that I lose to play my part.

Translated by William A. Sigler

2 commentaires

  1. loisobleu

    Merci Charles, le génie de cet artiste, qui est incontestable, pour moi sans que j’ai jamais pu m’en laver, tiens plus du mal tant il contient d’imposture (dans sa technique picturale comme dans sa moralité infecte) j’ai vécu de près ses dernier jours et ai ressenti pire que si j’avais été au Prado devant « Les peintures noires »…

    N-L 11/12/15

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